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mercredi 24 septembre 2014

Mon pied droit


C’était mon pied droit           

Tu dansais tu bougeais je faisais comme si de rien n’était
            Et tu as pilé
            Sur mon pied droit
 
            On s’est regardé on s’est demandé
            Et puis tu as continué à danser
            Sur mon pied droit
 
            J’ai souri tu m’as surpris tu m’as suivi quand je suis sorti
            De cet endroit
 
            On s’est pas touché
            Ni même parlé
            Tu as continué à marcher quand je me suis foulé
 
Le pied droit

Est-ce que ces petits trucs de rien du tout qui me passent par la tête alors que par hasard j’ai un stylo et un papier mériteraient que j’en parle? C’est du rien du tout, une petite rimette sans envergure, sans véritable sens (quoique…), juste comme ça pour scribouiller.


Je n’écris pas, je scribouille des mots. Qui veulent dire juste des petites affaires, des petites situations qui n’existent que dans ma tête et qui me donnent une excuse pour déblatérer des enfantillages. Comme mon pied droit, qu’on a accroché quand j’étais assis au comptoir dans un bar plein à craquer où j’étais allé prendre un verre après la soirée d’un mariage où ma blonde m’avait laissé aller seul (enfants obligent – mais on se reprendra dans quelques semaines…). Je me suis alors retourné vers le comptoir, j'ai sorti un papier de la poche de mon veston, un stylo-bille de l’autre, et j’ai écrit comme ça, sans y croire, la première partie. Refoutu le papier dans mes poches, fini ma bière, et je suis allé me coucher.
 
Ça fait quelque temps de ça – les mariés sont revenus de leur voyage de noces – et hier, je suis retombé sur ce papier, qui traînait sur mon bureau à travers deux-trois autres trucs médiocres, des factures de gaz et de resto, des enveloppes vides, et autres cossins (mon bureau est temporaire, alors foutrement en désordre…). Les autres trucs médiocres sont tous allés pronto à la récup – malgré ce qu’on pourrait croire à lisant certaines merdes que je mets ici, je suis parfois capable de réaliser que j’écris des trucs vraiment nuls à chier que je détruis prestement… Mais ceux-ci me plaisaient un peu – un propos naïf et un peu bon enfant, avec un rythme que j’aimais bien. Après avoir trouvé le papier que je cherchais, je suis allé prendre ma douche, et c’est là que la deuxième moitié m’est venue. J’y ai fait par la suite quelques ajustements, mais rien de majeur, et je l’ai lu, et relu, et cité, et récité, et, ma foi, je ne sais pas pourquoi, mais je sens qu’il y un bon fil dans ça. Pas que c’est bon – il manque clairement un deuxième niveau, c’est beaucoup trop anecdotique – mais j’y sens du possible.

Mais, comme je me disais il y a quelques semaines : tant pis, allons-y, il faut alimenter ceci, je dois me remettre à la plume, et qui a écrit écrira (et bu boira, mais pour moi, on dirait, ça va ensemble…). Et si c’est nul, whatever. Personne ne le dit jamais anyway.

dimanche 24 août 2014

Impromptu - pour des bas filets



Comme un bleu, je me suis fait avoir
Je me suis bêtement fait leurrer
Bien que le filet fût bien noir
Dans son entrejambe je suis tombé
 
Mais pourquoi aurais-je résisté
Et comment aurais-je pu, anyway
La douceur du piège sous ses mailles
Aura sans doute été ma juste faille
 
Je m’y suis donc joyeusement jeté
J’ai pris mon souffle, fermé les yeux
J’ai enfoui ma tête dans sa féminité
Et je m’y suis perdu - comme un bleu

mardi 21 janvier 2014

Semaine 15: Photo de famille

LES MATINS D’HIVER SE PRÉLASSER SOUS LES COUVERTURES…

Beep ! – Beep !
Snooze.

Beep ! – Beep !
– BEEEP !
Snooze.
 
Beep ! – Ah pis toi tais-toi!
 
On se lève, debout garçon
Allez petit va faire pipi
Pantalon céréales, paires de bas verre de jus
Beep ! Beep ! Fuck ! Off.
Qu’est-ce que tu veux manger
Chandail avec du creton dessus
Parle pas la bouche pleine
Maman va être en retard
Allez les dents va faire pipi
Pantalon sac d’école et les bottes boîte à lunch
Mets tes mitaines et ta collation
            Mais pas encore
            Mais rien du tout
 
Voilà l’autobus
Bonjour monsieur Denis
Allez vas-y mon grand
 

            Je t’aime papa.
 
            (beep ! beep !)
 
[Je reprends le défi 30 semaines où je l'avais laissé en 2012]
 
Les matins d’école sont les pires matins. C’était vrai quand j’étais plus jeune – à quoi bon se lever si c’est pour faire quelque chose, après tout. C’est toujours vrai quand je suis parent. Dans toute son incohérence, ce que j’ai écrit là illustre assez bien la routine chronométrée nécessaire pour pousser le plus vieux – qui ne veut pas se lever, évidemment, alors que la fin de semaine, il est dans notre chambre en chuchotant à tue-tête à 6 h 15 qu’il aimerait bien écouter la télé… — pour le pousser donc, sans aucune méchanceté, dans le bus qui l’amène se faire éduquer par des plus compétents que moi dans l’élevage de descendance. Bon, j’avoue que j’ai cacophoné la chose un peu beaucoup, mais le stress qu’il soit en retard fait qu’il y a toujours un bout du matin qui me semble aussi chaotique. Et je ne suis que matelot dans tout ça, c’est la maman qui est capitaine du navire (elle, elle s’est levée au premier coup de cadran…), alors c’est dire comment ça doit être dans sa tête!
 
Ça va toujours trop vite, on a l’impression de les attacher dans leurs vêtements, de les gaver comme des poules du Kentucky (quand ils veulent bien manger et qu’ils ne sont pas dans une passe d’anorexie préscolaire), de les empêcher de découvrir le monde et leur imagination en coupant les jeux après cinq minutes (« encore une minute! », comme si on pouvait négocier avec le temps) pour faire des choses aussi futiles et inutiles que brosser les dents ou faire pipi avant de partir (« je l’ai fait tantôt! »). Nous, on ne se parle pratiquement plus – tu fais quoi, tu es où, tu reviens quand, avec qui – oui non non oui oui non Rita – un ti bec en partant à la mauvaise haleine du quasi-retard. Au bout du compte, les matins d’école, eh bien, ils ne sont pas… satisfaisants pour personne.
 
Et puis là, tu as ton petit qui soudainement te fait un câlin avant de partir. Qui te dit « je t’aime papa! » même si tu as bien l’impression que tu ne le mé
rites pas. Qui te fait un thumbs up dans la fenêtre du bus avec un sourire fendu jusqu’aux oreilles. C’est comme si un autre cadran se mettait à sonner dans ta tête.
 
Il serait peut-être le temps de juste prendre le temps. Même les matins d’école.
 
La tite-morale-à-deux-cennes est clichée, c’est sûr. Mais demain, je veux voir mes enfants rire avant qu’ils partent à l’école et à la garderie. Ça doit être aussi important que le déjeuner, ça…

mercredi 24 juillet 2013

Attraction Polaire


Tout commence toujours par un touché
Un doigt qui effleure comme par hasard
Un regard gêné, excuse, je t'ai accroché
Un contact surprise entre deux corps

Un électron échangé      Comme des astres leur coeur
La polarité inversée       Gravitent doucement en âmes-soeurs

Une caresse timide, lente et silencieuse
Qu'au mélange des parfums s'enflamme d'un baiser
Vient raviver le coeur de l'étoile capricieuse
Jusqu'à l'explosion d'univers par milliers

          Big.

          Bang.

C'est une galaxie dans leurs yeux, l'infini dans leurs mains
C'est pour toujours, pour maintenant; et plus jamais comme avant
Dans l'éternel ils sont dieux car elle attend en son sein
Pour l'Univers un atome, pour leur Amour un enfant

Congé forcé aujourd'hui dans ma petite chambre de Schefferville, à cause de la pluie, alors ce n'est pas l'endroit idéal pour déblatérer (ce que je fais toujours plus facilement dans ma grotte, avec une bière...), alors permettez-moi d'être relativement bref. Au retour de l'aéroport, après m'être changé car j'étais déjà tout mouillé, je me suis glissé dans mon petit lit simple pour retourner dormir – j'ai du sommeil à rattraper depuis les dernières semaines, et je m'étais levé à 5h30 tout de même, alors Morphée m'appelait. Après quelques minutes – vous savez, ces quelques délicieuses minutes entre l'éveil et le sommeil, où le corps est détendu, l'esprit est divagué et la conscience est intermittente – l'éveil a pris le dessus avec l'apparition claire, en tête, des trois premiers vers, et le reflet du quatrième pas très loin. Je me suis relevé pour les mettre sur papier (j'oublie vite ces temps-ci – hier, j'ai oublié mon lunch sur mon bureau, et je m'en suis rendu compte dans la brousse (merci, collègues, d'avoir dépanné mon estomac)). Anyway, après quelques bricoles, je suis retourné au lit, où j'ai sombré profondément et plus longuement que j'avais prévu.

À mon réveil le titre est venu soudainement et avant de poursuivre l'écriture, avant même de savoir vers où je m'en allais (l'imagerie atomique et galactique est venue après le titre), inspiré peut-être de ma localisation subarctique qui me rappelle mes nuits polaires, mais surtout d'une discussion écoutée distraitement hier soir à table entre un physicien, un géologue et une botaniste sur la théorie quantique... Il y a tout plein de sorte de monde, on dirait, au McGill Subarctic Research Station... Le reste est venu in and out le reste de la journée, avec plus de difficulté pour la dernière strophe.

vendredi 10 mai 2013

Only for you

En dépit de tous nos mystères silencieux
Des grafignes qui ornent nos cœurs d’amoureux
Il restera encore du temps pour nous deux
            Si tu veux

Rapidement je publie ce petit quatrain composé ce matin, en voiture, en chemin vers Trois-Rivières au son de Jay-Jay Johanson. Cette petite version, un peu facile, m’est venue spontanément, et je l’ai mise sur papier en entrant au bureau. Spontanément, enfin, pas tout à fait – j’y avais déjà pensé en écoutant la pièce à d’autres occasions. Mais jamais d’une façon aussi achevée. J’ai régularisé la métrique ce midi en mangeant mon riz au poulet sans saveur (ayant préparé mon lunch ce matin beaucoup trop rapidement…), bien que peu de changements étaient nécessaires (l’avantage d’écrire – même si ce n’est qu’en pensée – au son de la musique). J’ai aussi modifié passablement le troisième vers (restera au lieu de reste, encore plutôt que toujours, et du temps à la place… d’une place). Des petits changements, mais qui lui donne meilleure gueule, il me semble. Meilleur sens aussi.

C’est bon, Jay-Jay Johanson. Si vous ne connaissez pas, vous devriez écouter.

lundi 29 avril 2013

Septième image: bouton


Je t’ai vue comme une promesse :
Un bouton manquait au haut de ton chemisier.
Tu venais vers moi, doucement, avec paresse,
Un sourire délicatement dessiné
Sur tes lèvres et tes yeux charmants sur moi posés
Me regardaient, comme une première fois.
 
Je t’ai vue comme une promesse :
La ligne de ton soutien-gorge bleu foncé,
Sur ta blanche peau discrètement manifeste
Comme un horizon de souvenirs de tendresse,
Avait capturé mon regard embarrassé
Qui contemplait, comme une première fois.
 
Je prenais un verre assis à un bar quelconque, à Saint-Eustache, pas loin d’Oka où se tenait un colloque d’archéologues. Pourquoi étais-je seul à un bar de Saint-Eustache un soir de colloque d’archéologues à Oka, alors que l’on sait tous que la principale activité des archéologues en colloque est de prendre un verre quelque part, mais ensemble? C’est que je présentais le lendemain, et je devais garder des forces pour terminer de préparer ma présentation le lendemain avant-midi. J’avais donc abandonné collègues et amis sur la plage d’Oka pour revenir à mon pieu, me promettant que le lendemain j’en profiterais davantage, mais je n’allais tout de même pas aller me coucher là, comme ça, sans prendre un dernier verre – ça ne rendrait pas justice à la profession, à ma Beauce natale non plus, ni à ma réputation. (Pour la petite histoire, je n’ai pu célébrer beaucoup le lendemain, subitement atteint par un rhume qui nous avait attaqués, sans que je le sache, à la maison avant mon départ – annonce à mes collègues et amis : je vous ai peut-être infecté par mes poignées de mains ou bisous sur la joue, désolé).

Toujours est-il que je n’avais pas en tête les thèmes du présent défi, mais que j’avais envie de griffonner. J’avais un papier, et j’ai demandé un crayon à la barmaid habillée étrangement à la mode 80, avec une espèce de t-shirt gris, laid et trop ample, aux ouvertures pour les bras démesurément grandes, laissant entrevoir sous les bras les bandes latérales de sa brassière – brune tirant vers le chair. « Comme une promesse », me suis-je alors dit en voyant cette couleur qui rappelait celle de sa peau et qui donnait un peu la fausse impression d’être transparent, avant de sortir mon téléphone pour aller voir quel était le thème de la semaine.

Bouton, m’a-t-on dit. (J’ai relu cette phrase à voix haute, et ça sonne joliment… bouton, m’a-t-on dit, bouton matondi, bouton matondi!)

Et tout ça s’est mis en place. La rapidité et la fluidité de la première écriture me poussent à considérer ces vers comme spontanés, bien qu’il y ait eu exercice de réécriture par la suite – une première écriture vendredi dernier, et je l’ai retravaillé ce soir, lundi, en attendant que les petits soient bien endormis. J’ai tenté de redresser le rythme par une régularité des principaux vers, bien que la rime, elle, ne soit pas régulière. J’avais d’ailleurs un peu de difficulté avec l’écoulement des vers : ça bloquait un peu parfois. C’était peut-être dû à l’absence de ponctuation, que je viens d’ajouter et je trouve effectivement que ça aide. La séparation des sujets, verbes et compléments joue peut-être aussi…
 
Je suis content de la façon dont le thème de la semaine ne devient qu’une excuse pour écrire quelque chose, comme le point de départ, la provocation, à la création de toute une image, de toute une scène, et son point final. Ici, je pars du bouton, dont l’absence est présentée au premier vers qui décrit l’image. Puis, la caméra recule, vers un plan large où l’on voit la dame s’avancer vers moi. Finalement, elle revient, en zoomant, avec mon regard, sur cet endroit où devait se trouver le bouton.

Ce fragment de douze vers réussit ainsi bien, je trouve, à accomplir l’idée de faire des images, des dessins, des photos, avec des vers. Je le trouve évocateur, et je crois qu’il réussit à recréer, pour chaque lecteur (well, chaque lecteur masculin, du moins), une image qui lui parle. En tout cas, moi, ça me parle. Ce qui veut sans doute en dire plus sur moi que ça devrait…

Bon, ça va, je le mets dans les Perv' vers...

mardi 16 avril 2013

Cinquième image (prise deux): 10 AM


Dix heures du matin
Le vent entre par la fenêtre ouverte
Et porte vers moi l’odeur humide de la pluie
La mince couverture me drapant dans mon lit
Ne m’offre aucun réconfort dans la froideur de cet octobre tardif
Et la grisaille s’infiltrant doucement dans ma chambre
Vient déchirer ma peau comme des cristaux par milliers
 
Je soupire et gémis
Mais à chaque souffle l’air glacial me noie un peu
Je ne dors plus, je ne vis plus
Je suis une statue de glace, éphémère, qui flotte dans un nuage
Qui bien qu’immobile, se tortille par en dedans
Qui existe puis n’existe plus, puis revient, revient disparue
Je me suis évaporé, puis j’ai plu dans l’océan
Et les vagues m’ont porté
M’ont porté à mon lit 

J’ouvre les yeux doucement et les pose sur le cadran
Dévisage en silence mon reflet devant l’heure
Dix heures et une du matin
Je me retourne, je me rendors
Je m’éveillerai quand il ne mouillera plus dehors

Paragraphe générique sur le fait que je suis en retard dans mon défi et c’est toujours pour les mêmes raisons.

Je travaillais en fin de semaine sur le thème actuel, sur l’image que je n’ai pas encore livrée – un souper –, mais ce papier était resté quelque part chez moi. La radio me tapait sur les nerfs ce matin sur la route, alors je me suis mis à penser à cette image – 10 AM – que j’avais sautée (que j’avais échoué) en me disant que dix heures revient tous les jours. J’avais des trucs pas pires, des vers bien jolis, mais que je trouvais un peu trop premier niveau. Anyway, rendu au bureau, je n’avais pas fini, et je suis tombé soudainement dans le jus alors c’est resté immatériel.

À mon retour, j’ai tenté de reprendre le fil, mais je commençais sincèrement à trouver ces vers trop élémentaires. Il mouillaissait, puis pleuvait, avec du brouillard dans les fossés. J’ai repensé à une image que j’avais eue lors de ma première tentative – je suis étendu dans mon lit à 10 h, et le Soleil passe à travers les stores, et je veux rester couché – et je l’ai travesti pour fiter avec la météo du moment. Le premier bloc de vers a été écrit sur le bord de l’autoroute, parce que je savais que je l’oublierais, et que le dictaphone, ça ne marche pas. Quand j’y mets des vers, systématiquement, je les trouve mauvais au moment de les réécouter. À preuve, ce que j’avais tenté de faire le matin. C’est peut-être ma voix, que je n’aime pas, ou parce que j’écris des choses qui se lisent, mais ne se récitent pas, je ne sais pas, je n’ai pas vraiment déjà essayé.

On est à des lieux de ce dont je parlais justement lors de l’échec. Pas de contraintes ici, sauf le thème. Des vers spontanés, et libres, affranchis des règles que je m’impose habituellement. Ça fait quelques fois que je donne dans la poésie plus moderne avec ce nouveau défi, et je ne sais pas si c’est une bonne chose. J’avais tendance à ne pas aimer cette poésie éclatée, dont je ne saisissais pas l’essence, et maintenant me voilà à couper mes phrases en vers sans raison apparente…

Cela dit, j’aime tout de même l’ambiance générale qui s’en dégage, cette minute d’éveil dans la froideur du matin qui nous porte d’un monde à l’autre avant de se rendormir. Sans doute devrais-je le retravailler, il est jeté ici assez brouillon, mais bon, il faut que je publie de quoi un moment donné ici…

mardi 19 février 2013

Première image: Your View Today

LA SPLENDEUR DU NÉANT

Vue d’ici
            Les nuages sont comme les soupirs du ciel
            Par une froide nuit d’hiver
            Et les étoiles ne sont qu’un triste rappel
            De nos lumineux sourires d’hier

Vue d’ici
            L’horizon s’embrume de la grisaille du matin
            Qui humecte les murs bétonnés
            Et les vagabonds qui marchent par quatre chemins
            Ne savent plus trop vers où aller

Vue d’ici
            Le bleu du ciel est vide comme mes heures
            Et triste comme tes yeux
            Le blanc des murs est mort comme mon cœur
            Et comme mes jours silencieux

Vue d’ici
Le Soleil caresse amoureusement les pierres
            J’aimerais m’envoler vers ce champ de mort
Vue d’ici j’apprécie le ciel comme l’enfer
            Je veux juste sortir de ce corps

On aura compris que le thème Your view today ne m’a servi que d’inspiration lointaine pour ce texte. J’ai rapidement pris la décision de ne pas m’asseoir devant ma fenêtre pour regarder dehors (entre autres choses parce que quand j’ai le temps de regarder par ma fenêtre, il fait souvent noir dehors, et clair en dedans, alors on ne voit pas grand-chose…), bien que j’aille cette envie d’essayer la poésie paysagère depuis longtemps (c’était d’ailleurs un des thèmes du 30 semaines que j’avais hâte d’atteindre). Ce sera pour une autre fois.

Avec Your view today, l’idée m’est rapidement venue du « vue d’ici », mais dans un sens plus abstrait. De prendre cette excuse pour raconter une histoire du point de vue de celui qui la raconte. Au départ, je cherchais plus du côté personnel ou, paradoxalement, de l’universel (c’est là mon arrogance : c’est moi ou l’Univers) – prendre un paysage ou une vision comme métaphore pour manifester une pensée, une idée, une émotion qui me touchait, ou qui pouvait toucher n’importe qui. Mais je ne dépassais pas un ou deux vers, plutôt boboches.

Ce soir, j’ai terminé mon travail un peu plus tôt, alors en fin d’après-midi j’ai regardé un des fragments que j’avais écrit quelque part cette semaine et chiffonné en poche, et je le trouvais nul à chier. Puis j’ai eu l’idée de regarder une photo que je me souvenais avoir prise sur le terrain l’année dernière, une photo toute simple, mais qui me fait un certain effet. On y voit une longue route toute neuve, rectiligne, qui sépare en deux une forêt. Je ne suis pas photographe, je n’ai pas ce talent, mais alors là pas du tout, mais pour une raison que j’ignore cette photo… me parle. Je l’ai ouverte, je l’ai regardée, et j’ai tenté d’écrire là-dessus, en prenant ce paysage comme inspiration pour la métaphore. Ça aussi, ça a crashé en deux minutes.

Je tournais le stylo entre mes doigts, les deux pieds sur le bureau, à regarder le temps s’avancer sur mon écran – j’allais devoir bientôt partir chercher les enfants à la garderie. Mais je devais écrire quelque chose aujourd’hui : ça aurait été bête, après m’avoir lancé un nouveau défi, de me planter la première semaine. Et puis, le stylo s’est mis à glisser.

Vers spontanés, oui, du moins, au début, mais qui ne se sont pas écoulés d’une traite, comme c’est souvent le cas. Ils sont venus par à coup, souvent vers par vers, mais malgré cette écriture saccadée, ponctuée de réflexions, je n’ai pas trop su où je m’en allais avant la fin. J’aime bien quand un texte se dévoile ainsi à moi.

Les deux premières strophes se sont écrites d’abord, plus rapidement, et l’on voit également que ce sont elles que j’ai le moins eues à retoucher. Puis, j’ai dû quitter après avoir entamé une première version de la troisième strophe, qui m’avait poussé dans le coin – je serais sans doute surpris si j’allais voir la phonétique de la chose, mais, comme avec le mot« même », j’ai bien de la misère à faire rimer « âme »… Peut-être à cause de notre accent québécois, peut-être à cause que je parle tout croche, mais bon, je ne trouvais pas comment poursuivre la chose avec ces finales. C’est à mon retour, quand j’ai remplacé ces vers, que j’ai réalisé ce que je racontais.

Au départ, j’y voyais un peu n’importe quoi, un spleen quelconque que je ne ressentais pas – un fake, finalement. Parce que j’étais (et je suis toujours) de bonne humeur quand j’ai écrit ça. À la fin de la deuxième strophe, j’avais quelques idées : c’est une complainte de quelqu’un d’isolé, institutionnalisé. Il aurait pu être à l’hôpital ou interné, mais à ce moment-là, j’avais plutôt l’impression qu’il était en prison, et je m’orientais plus ou moins activement vers là. Mais au redémarrage de la troisième strophe, je savais qu’il n’était pas en prison : c’est un homme malade, très malade, que la maladie isole et qui n’a plus aucun espoir que mourir.

Je le vois assis devant sa fenêtre, jour après jour, nuit après nuit, à attendre, à se souvenir. Des médecins veulent l’encourager, ils défilent devant lui avec l’espoir de l’aider, d’apaiser sa douleur, sans réaliser que son mal se trouve maintenant dans son âme. Qu’il faudrait simplement le laisser mourir. J’ai déjà écrit sur le même thème, il y a très très très longtemps, quand j’étais au secondaire, en 1994 ou 1995. Je viens tout juste de le relire, et c’est drôle, je reconnais un peu mon style, déjà. Je terminais le texte par une citation de Jorge Luis Borges : « Il chercha dans la mort la splendeur du néant ». D’où le titre, que je viens de donner à ce texte-ci. Je n’ai aucune idée d’où vient la citation – trop con pour l’écrire, en 1995…

Mais pas d’inquiétude, perso, je suis de bonne humeur. Je viens de boire un verre de lait. Sérieusement, j’ai-tu l’air de quelqu’un qui boit du lait quand ça ne va pas?

jeudi 4 octobre 2012

Au final


Des mots se forment dans mon esprit
Mais hésitent à franchir ma voix
Car parfois tout semble avoir été dit
Et il ne reste plus que toi et moi
Au final
            J’aurais eu envie de parler
            Mais tu t’étais déjà levée

Quand je me suis rendu au lit
Et me suis étendu près de toi
Tu étais déjà endormie
Et avais pris tous les draps        (moi j’avais froid)
Au final
            J’aurais bien aimé me rapprocher
            Mais tu as comme grogné

Ce matin quand tu es partie
Et que je t’ai soufflé au revoir
J’ai réalisé avec tragédie
Que tu ne reviendrais pas ce soir
Au final
            J’aurais dû me mettre à parler
            Même après que tu te sois levée

Écrit dans le temps d’une douche, en attendant de prendre la mienne parce que je suis crotté du terrain sous la pluie, et puis sans pratiquement de révision. C’est le fragment de phrase « au final » qui m’a orienté, mais encore une fois la destination n’a pas été celle que j’anticipais. Mon stylo-bille mexuscan cargo (aucune idée d’où ça vient, mais c’est laid en titi comme stylo!) m’a amené ailleurs, m’a fait raconté une histoire qui est sans doute bien commune, bien banale. L’art de la discussion, surtout celui qui ne ressemble pas à un art, se perd de nos jours… On fait du bruit plutôt que dire des choses, et puis, ça mène souvent nulle part.

Suffit maintenant, je vais me décrotter et me taper Halloween 2. Ce qui n’a absolument pas rapport avec rien.

mercredi 29 août 2012

Fragment écrit aux Ailes Piquantes



Comment peux-tu me manquer
            Quand je ne t’ai jamais connue

Et comment as-tu pu me manquer
            Tu ne peux pas ne pas m’avoir vu

Il faut vraiment que je me remette au crayon. Je l’ai mis de côté pour l’été, à la suite d’une panne de motivation qui origine possiblement dans le fait que j’aurais un tantinet besoin de vacances. J’ai une couple de titres qui s’éparpillent dans ma tête, parfois accompagnés de pseudo-vers, ou d’un pré-vers, ou encore d’un vers primitif qui cherche à évoluer, mais c’est pas mal tout ce que j’ai fait depuis la fin juin. Et puis, il faut que je me remettre au défi 30 semaines, que j’ai mis en stand-by je ne sais plus quand…

La motivation revient tranquillement, je pense. Des idées de vers plus matures se pointent parfois dans mon crâne. J’ai parfois l’impression de voir des métaphores. Je laisse tranquillement (re)tomber le talk radio en voiture pour écouter des bonnes musiques, ou un beau grand silence – ce qui fera sans doute du bien à ma santé mentale en général.

Alors, je me relance, même si ce n’est qu’avec un fragment peu étudié, apparu en explosion dans mon front en allant souper plus tôt aujourd’hui. J’entendais dans les speakers de l’auto PJ Harvey répéter qu’elles’ennuyait – dans une pièce qui n’a rien de romantique (quoique je ne suis pas trop certain de comprendre son sens, surtout après avoir vu le vidéo…). Comme ça arrive parfois, j’ai tenté de trouver un équivalent français qui pourrait traduire l’émotion contenue dans sa répétition de « Oh God I miss you » - les mots sont simples, mais je voulais quelque chose de plus mieux que « Dieu que tu me manques » - ou, en plus québécois, que « Ostie que je m’ennuie ». Remarques, c’est très beau, « Ostie que je m’ennuie ». Ça m’a fait jouer avec l’expression « tu me manques », et éventuellement des canaux obscurs par lesquels passe mon écriture sont sorties ces quatre lignes.

Je me suis alors stationné pas très loin du terminus d’autobus, et une suite se dessinait, ou se devinait à l’horizon, si tant qu’on peut avoir un horizon dans une tête. Mais, je suis sorti de la voiture, me suis dirigé vers le parcomètre, lu pour savoir si je devais payer (non après 17h), et puis, la réalité a chassé ce qui aurait pu s’en venir. Maudite réalité.

Arrivé au restaurant Les Ailes Piquantes, choisi pour ses burgers à 10 $ le mardi soir, je prends place au bar, commande une bière, et demande à la serveuse si je peux lui subtiliser quelques secondes son stylo. Sans papier sur moi, et ne voulant pas l’intercepter une deuxième fois, je prends ma napkins pour y inscrire le fragment élaboré en voiture. C’est toujours drôle voir la réaction des gens quand ils me voient écrire sur des napkins.

J'aime comment le premier et le troisième vers disent pratiquement la même chose, mais veulent dire des choses complètement différentes. Deux tragédies différentes. D'abord, je ne te connais pas, mais cette inconnaissance m'est douloureuse - c'est un thème qui me revenait souvent dans ma première période d'écriture, celui de l'inconnue ou du figurant qui pourrait possiblement tout changer. Ensuite, le drame de tout avoir fait pour être vu, mais d'être resté ignoré. Une thématique qui m'est revenu à quelques reprises depuis le début de J'inexiste. Un psy y trouverait sans doute quelque chose. J'écris ceci, et je réalise que c'est sans doute plus inspiré encore de PJ Harvey que je l'avais d'abord reconnu - dans la deuxième partie de sa pièce, la répétition de "Oh God I miss you" est précédée de la répétition "Nobody's listening"...

Comme ça m’arrive souvent, je sais que ce fragment risque de demeurer à ce stade, bien que j’aimerais bien le développer davantage.

Alors, un redépart pour J’inexiste – je me remets à la publication au moins hebdomadaire, même si c’est parfois bof.

lundi 18 juin 2012

J'inexiste, le (premier ?) texte


Je m’anarchise seul dans mon coin
Et perds la gouvernance de mon cœur
Laissant naïvement libre cours à ma main
Qui va triomphante parée d’airs de grandeur
            Qu’il sourit, mon visage! Qu’il soit triste!
            De toute façon, moi, j’inexiste

Seul derrière des paravents de faux-semblants
Blotti sous une cape de sauf-conduits
J’observe silencieux le passage du temps
Qui ricaneux s’écoule cruel au ralenti
            Attaque! Lui dis-je, si c’est ton caprice
            De toute façon, moi, j’inexiste

Et alors que me frappe sa lame de dédain
Et qu’il m’assassine en silence à grands coups d’heure
Et alors que je m’écroule sur le sol sans témoin
Sans amis, pour sûr, mais aussi sans malheur
            S’envole mon silence, je me mets à hurler
            « Je n’ai pas encore fini d’inexister! »

L’écriture automatique, les vers spontanés, mènent à des pièces qui peuvent être obscures même pour leur auteur. Je ne suis pas certain de la signification de ce texte, mais je le trouve joli, j’en aime les sons, les images, l’atmosphère. Il y a deux ou trois semaines, j’ai retrouvé cette page brouillon sur mon bureau au Collège. J’avais complètement oublié que j’avais écrit ça jusqu’à ce que je la retrouve. Le texte n’était pas complet : il manquait les deux derniers vers. Ils ont été difficiles à trouver, et je ne suis pas encore tout à fait à l’aise avec ceux que j’y ai mis – quand le reste du texte a été écrit d’une traite, il y a quelque temps, il n’est pas facile de se remémorer l’état d’esprit dans lequel j’étais, ni même quel était le sens que je visais, s’il y en avait un. Je me souviens que mon crayon – un pousse-mine orange qui ne fonctionne plus maintenant… — s’est arrêté au quatrième vers de la troisième strophe, et je n’arrivais alors même pas à proposer une ligne au papier. Je m’étais donc arrêté là, coït poétique interrompu avant la finale qui, pourtant, s’annonçait bien. On voit d'ailleurs qu'il n'y a aucune rature, et à peu près aucun changement, dans les seize premiers vers, alors que j'ai réécrit plusieurs fois les deux derniers...

Je parle de vers spontanés, mais il y avait eu une provocation à ceux-ci. Ça faisait déjà quelque temps que je me disais qu’il faudrait bien que j’écrive une pièce éponyme au titre du blog, cette idée d’inexistence que j’ai un peu placée au centre de ce projet – une idée, ou un fantôme, une ombre que je ne pourrais encore vraiment mettre en paroles. J’attendais un peu le millier de visites, puis les six mois de mise en ligne. C’était ma première tentative, et je savais déjà qu’il y en aurait d’autres. Alors j’avais ce thème, « J’inexiste », qui orientait un peu l’errance du crayon.

Et, pour l’histoire, il y a déjà eu une seconde tentative, qui à mon souvenir n’était pas mauvaise du tout. Écrite en plusieurs temps pendant une même soirée – celle du party de fin d’année au Collège –, elle prouvait que je pouvais encore écrire quelque chose de sensé même quand je suis un peu en boisson, même dans des endroits bruyants, et selon mon souvenir quelque peu confus je l’avoue, ce n’était pas mal du tout. Mais il arriva ce qui devait arriver : j’ai perdu le papier que j’ai sans doute mal remis en poche, alors il y a un figurant qui a trouvé ça et qui n’a sans doute pas été capable de lire mes pattes de mouche affectées par l’alcool. Zut. Tant pis.

Revenons-en à J’inexiste version 1. Quelques commentaires sur le fond. L’idée de verbifier (?) le mot anarchisme a été reprise dans Liberté! Un poème cochon que j’ai écrit après ceci. « Je m’anarchise », c’est un peu dire que mon corps, mon être, mon moi se révolte et répudie son maître habituel, mon esprit, ma raison, ou mon cœur, ça dépend des jours, ça dépend des heures. J’aime bien ce néologisme. La première strophe semble dire que mon corps fait un peu ce qu’il veut, il est là, mais, moi, je n’y suis pas, et je m’en fous.

La deuxième strophe est plus obscure. Je me souviens que le mot « sauf-conduit » est venu de lui-même comme pendant à « faux-semblant », bien qu’à part le trait d’union et la métrique des mots, ils n’ont rien en commun au sens ou au son. Le deuxième vers m’a pour un temps laissé perplexe – qu’est-ce qu’une cape de sauf-conduits? Mais je suis arrivé à le rationaliser un peu : comme j’habite maintenant mon corps d’une façon un peu illégitime – je me suis ostracisé dans la strophe précédente –, cette cape représente toutes les exceptions qu’il m’a fallu aller chercher pour être autorisé à y rester. Mais je n’y suis pas à l’aise, et je me cache, je sais que je suis un ennemi parmi mes ennemis. Et ceux-là, le Temps en premier lieu, jouent avec moi, rient de moi, me taquinent, m’agacent, me narguent.

Et quand finalement j’en viens près de la disparition, je réagis : j’aime cette inexistence, qui fait de moi celui que je suis, et qui me permet de faire ce que je fais. Si, jusque-là, je semblais être indifférent à ma condition, et même en venir à penser souhaiter sa fin, j’en arrive finalement, peut-être trop tard, à réaliser que c’est une condition que j’avais choisie, que j’aimais, et que je voulais poursuivre.

Le vers
Sans amis, pour sûr, mais aussi sans malheur
est celui qui me fait douter des deux derniers vers. Ce vers semble indiquer l’acceptation résignée de la solitude au moment de l’épreuve – oui, je suis seul, mais il est sans doute moins malheureux d’être seul que d’être avec des amis qui tenteraient sans doute de me sauver, ou dont la tristesse survivrait à ma mort. S’il y a cette acceptation au quatrième vers, pourquoi soudainement aux cinquième et sixième vers je désire survivre?

C’est quand même étrange, faire l’exégèse de son propre texte… 

lundi 30 avril 2012

Deux hirondelles



J’ai vu valser deux hirondelles
S’ébattre en amoureuses du bleu de ses yeux
Il suffisait de lui dire qu’elle était belle
Pour qu’elles volent sous ses cieux

J’ai vu valser deux hirondelles
Par une délicate journée de printemps
Et alors que j’observais leur danse sensuelle
Je les vis arrêter le temps

J’ai vu valser deux hirondelles
Quand je lui ai dit –
                                   – t’es belle

J’avais une commission à faire - je devais aller chercher des documents, et laisser en échange d’autres documents, un peu comme un agent secret, mais en beaucoup moins cool. Une bonne route tout de même, près d’une demie-heure à l’allée, et une autre (évidemment) au retour. C’était une journée un peu froide, mais ensoleillée. En quittant le lieu de cueillette et dépôt, je démarre le moteur, manœuvre pour sortir du stationnement, et puis voilà que me survolent deux oiseaux, qui se battaient, ou s’embrassaient, ça dépendait un peu de l’humeur du spectateur, je dirais, alors disons s’ébattaient, c’est comme se battre, mais en plus positif.

Ç’a été une image d’une fraction de seconde, en contrejour, et comme je suis plutôt nul en ornithologie, je suis présentement incapable de dire si c’était des hirondelles. Mais, étrangement, ça m’a fait penser à deux hirondelles qui dansaient en vol, alors, qui sait, peut-être était-ce des hirondelles. Cela n’a que peu d’importance.

J’avais mis Old Ideas de Leonard Cohen dans le lecteur, et sa pièce, incroyable, Come healing jouait à ce moment. L’image des oiseaux et la musique, en se combinant, m’ont donné le goût d’écrire ceci – comme quoi l’inspiration, c’est une question d’environnement (tiens, un beau slogan pour Greenpeace). Avec la colère ambiante qui pèse ces temps-ci, et avec ma colère qui n’est pas ambiante parce que très distinctement localisée dans la région de mon plexus solaire, j’avais besoin d’écrire quelque chose de gentil, quelque chose de cute, et, peut-être, quelque chose de beau. Je me suis donc accroché à cette idée des deux hirondelles en revenant vers la maison, en jouant avec des rimes en –elle et en –eu. Éventuellement, je suis descendu ici-bas pour voir si j’avais réussi à mettre des mots dans un ordre qui pouvait me plaire. J’en ressors avec une pièce un peu naïve, mais que je trouve jolie.

L’idée du vers

Il suffisait de lui dire qu’elle était belle

m'est venue la semaine dernière. Je ne savais pas le pour quoi de ce vers; juste de « lui » dire ça, et ça aurait du suffire, pour quelque chose. Cette petite phrase, deux sons – t’es belle – et alors les possibilités explosent. Essayez-le, c’est sans doute vrai.

Le bleu des yeux, c’est ce qu’on appelle une licence poétique. Car la mienne a les yeux vert et noisette, genre, ce qui fait beaucoup de pieds, et puis en plus, ça ne va plus avec tout le reste de l’imagerie, le ciel, les hirondelles…

mardi 10 avril 2012

Un troisième regard

Il était une fois un regard
Vert comme un bourgeon de printemps
S’élevant timidement avec l’espoir
Qu’on le regarde gentiment

Alors j’abandonne officiellement le défi de la semaine 13, soit Comic, tout simplement parce que ça fait trop de temps que je le traîne sans rien y faire. J’avais des idées, comme je l’ai dit la semaine dernière, mais je n’arrivais pas à aller plus loin que le thème général. J’ai blâmé mon manque de temps, mais je pense en fait que c’est dû à ma méconnaissance des sujets. Je suis un amateur de bédés, mais du côté très casual du spectre. Les quelques idées que j’avais – sur l’amour et le meurtre du Démon dans Spawn, ou sur la colère silencieuse de Akira, par exemple –  demandaient que je retourne aux sources pour trouver les images qui auraient illustré le thème, et pour éviter des erreurs qui, lorsqu’elles auraient été apparentes, auraient gâché mon plaisir d’avoir écrit ces vers.

Alors, un deuxième échec. Je pense qu’en lâchant prise sur ce thème, je vais pouvoir repartir du bon pied pour le prochain défi – Fav. fairytale

Entre temps, je semble obsédé par ce vers

Il était une fois un regard

C’est ici la troisième itération de cette idée. Après l’érotisme, puis le doute, voici le quatrain de l’espoir. Ces strophes pourront éventuellement, peut-être, être assemblées pour en faire un poème complet. Celui-ci, comme le Regard gris, propose une imagerie que je trouve moins forte que le Regard bleu. Bien qu’écrits a posteriori, il me semble que dans une construction qui rassemblerait ces trois strophes, ces deux dernières devraient arriver avant – tant dans le sens et le sentiment (le doute, puis l’espoir, puis l’amour), que dans les mots. Le Regard gris est seul, le Regard vert cherche, le Regard bleu a trouvé. Il y aurait sans doute des ajustements à faire pour vraiment concrétiser cette ascension.

J’ai complètement évacué l’idée de compter les pieds dans ces trois fragments, bien que j’ai réécrit certains vers, car je sentais, à la relecture, un problème dans le rythme. J’ai écrit, et je lis, ces vers en couple – les deux premiers vont ensemble et se lisent comme une seule phrase, suivie des deux derniers, aussi ensemble et d’un seul souffle.

Je n’ai jamais lu les trois strophes une derrière l’autre, et j’ignore quel effet la répétition de

Il était une fois un regard

peut avoir. Est-ce que ça rend la lecture incommode, ou répétitive? Peut-être devrais-je modifier ces vers s’ils sont pour être répétés, de façon à rendre la répétition moins monotone. Mais je soupçonne que d’autres strophes viendront avant d’en arriver à cette étape.

vendredi 6 avril 2012

Il était une fois un regard, part 2





Il était une fois un regard
Gris comme un ciel incertain
Hésitant à la porte d'un trésor
Qu'on vienne lui tendre la main


Je pense abandonner le défi de cette semaine (en fait, la semaine dernière). Mais tout de même, au moins, je réussis à écrire. Voici quelques lignes, une suite de ce que j'ai écrit en début de semaine, rapidement jetées sur papier en attendant que s'allume mon ordi... Les deux premiers vers ont été pensés en début de semaine, mais la suite est toute fraîche. Et comme je ne veux pas m'éterniser en bas ce soir (une tévé et une bière m'attendent en haut), je me tais déjà.

lundi 2 avril 2012

Il était une fois un regard



Il était une fois un regard
Bleu comme un océan de tendresse
Tâtonnant tranquillement dans le noir
Pour le sourire d’une caresse

Première chose : je sais que je suis en retard pour le défi 30 semaines, bien en retard. J’ai des pistes, et je pensais les réaliser vendredi dernier quand je suis sorti après une soirée vins et fromages, mais apparemment non, je n’arrive plus vraiment à écrire quand je sors. J’ai maintenant besoin d’un environnement différent pour entendre les vers. La vie change. Il m’arrive même, en voiture, d’avoir à taire la radio pour poursuivre une réflexion, ce que je n’avais jamais à faire avant. Mais reste que je suis en retard. Je ne le considère pas encore comme un échec, étant donné que je n’ai pas vraiment tenté quoi que ce soit.

À cette soirée de vins et fromages, j’ai parlé d’enthousiasme à quelqu’un. Ou, du moins, j’ai tenté de le faire. Je pense que j’ai eu l’air bizarre, ce qui n’est pas nécessairement nouveau, ni particulièrement grave, je vis très bien de mes bizarreries inoffensives et passagères. Mais avec le recul, il est vrai que dans le contexte précis de la conversation, « enthousiasme » pouvait avoir l’air déplacé. Je faisais référence, je dirais bien sûr si j’étais pédant, au sens original du terme, dans sa racine grecque, comme l'utilise Platon dans un de ses dialogues que j'avais lu au CÉGEP – enthousiasme comme la prise de possession d’un corps par un dieu ou une muse, qui inspire le possédé. Comme un oracle.

L’enthousiasme, donc, semble parfois provoqué d’étrange façon, et mène aussi vers des ailleurs improbables. Ainsi, ces vers ont été déclenchés ce matin, à la lecture d’une phrase de Salman Rushdie, dans ses Versets sataniques que je lis enfin :

« Il était une fois – il était et il n’était pas, comme disent les anciens contes, c’est arrivé et ce n’est jamais arrivé – alors, peut-être ou peut-être pas, un garçon de dix ans de Scandal Point à Bombay trouva un portefeuille dans la rue près de chez lui. »

Aucun rapport, dira-t-on. En effet. C’est l’apparition surprenante de ce « Il était une fois », et la précision qui le suit, qui m’ont allumé. Le regard comme sujet est apparu presque aussitôt, et le premier vers était composé avant même que je referme le livre. L’océan de tendresse, dans une forme différente, a rapidement suivi, et je me suis éclipsé de la famille pour aller coucher sur papier cette idée, et voir à la compléter. Quinze minutes plus tard, j’avais ce quatrain, dont le deuxième vers avait toujours une forme un peu différente. (Il faut évidemment oublier ce petit vers imbécile que j'ai écrit là pour rire et qui n'a jamais été sérieux...) Je suis remonté, les enfants se chicanaient, il fallait faire les courses, la vie m’exigeait, alors j’ai laissé la page sur mon bureau, et les vers en tête j’ai continué ma journée.

J’ai repassé mentalement ces vers, je les ai relus quand je venais près de mon bureau, et il y avait quelque chose qui accrochait dans ce deuxième vers. Le reste est resté sans changement (ou presque : « Tâtonner » est devenu « Tâtonnant »), mais celui-là clochait. C’était

Au-dessus d’un océan de tendresse

Ce n’était pas dans le décompte des pieds qu’il y avait un problème – j’avais décidé de l’ignorer ici, et de toute façon le troisième vers en compte également 10. Peut-être dans le son de « au-dessus »… J’ai donc changé successivement pour

Bercé par un océan de tendresse

Puis

Porteur d’un océan de tendresse

Mais non. C’est seulement ce soir que j’ai pensé que c'était peut-être dans le sens qu’il y avait un problème. Le regard ne traverse pas un océan, l’objet de son intérêt est à la portée d’une caresse. Il ne s’y trouve pas non plus bercé, car il a la volonté de chercher, il est actif. Et, finalement, il ne le porte pas – il est cet océan de tendresse. Ce sont des yeux grand ouverts, qui observent doucement, en silence et persistance, qui érodent lentement jusqu’à ce qu’ils caressent la douceur de la plage dénudée.

Il y a un côté que j’adore dans ce fragment : l’érotisme aux corps absents. Ceux-ci ne sont pas même suggérés par les mots, qui agissent un peu comme une pudeur, mais il me semble impossible de ne pas les voir. Leur absence semble être le meilleur témoin de leur action, et de leur sentiment – ce n’est pas une baise que raconte cette histoire, c’est l’amour.

Et puis, on revient à Rushdie – est-ce arrivé, ou non? Est-ce un désir, une légende, un souvenir? Est-ce une histoire, ou est-ce l’Histoire? La précision des Versets me fait considérer sur un tout autre jour l’expression « Il était une fois », et j’aime l’ambigüité qu’il procure dans une histoire d’amour ou de sexe.

Mais comment un jeune Indien qui trouve un portefeuille a-t-il pu m’inspirer de la sorte? C’est sans doute ça, finalement, l’enthousiasme.

lundi 27 février 2012

Le Minotaure


Je me perds dans ce labyrinthe aux portes closes
Traînant derrière moi un sombre nuage
Mon regard abattu sur les murs moroses
À la poursuite d’un étrange mirage

Je marche silencieux la tête basse le dos penché
            Cherche l’origine de ce son que j’entends
            La mélodie d’une cascade enchantée
            Qui n’existe que dans mon esprit dément

J’ai pénétré cet antre tout à fait consciemment
            Sachant déjà que j’y rencontrerais la mort
            Qu’il serait impossible de faire autrement
            Que d’y affronter le terrible Minotaure

J’ai hésité avant de publier ceci. En fait, je me pose la question depuis la mise en ligne de J’inexiste si je me limite aux défis, aux exercices, ou si je me permets d’en mettre plus. Il n’y a rien d’engageant, sauf la mise en évidence de lacunes dans ma plume et de prétentions dans mes commentaires, à écrire une strophe sur Mickey Mouse ou à traduire une pièce d’un chanteur anglophone. Mais d’aller vers des vers (c’est drôle quand c’est écrit, ça, « vers des vers ») qui viennent de nulle part ailleurs que moi, c’est plus… intimidant.

Alors j’ai d’abord enregistré ce texte sur mon ordi, pour aller rejoindre tous les autres qui n’en sont jamais sortis, et qui n’ont pas été lus par personne, jamais. Parmi ceux-ci, il y a des merdes incroyables (comme un poème savamment intitulé « Merde dans un bar »), mais il y a aussi des pièces plutôt charmantes (comme ce fragment que j’avais intitulé « La nouvelle iconoclastie », et que je ne vois plus comme un fragment). Par un hasard sans doute volontaire quoiqu’inconscient, j’en arrive à me questionner sur l’existence de ces nombreux textes – que sont-ils, s’ils sont là pour être perdus quand mon disque dur va se crasher? (oui, il faudrait que je me fasse des copies, parce que je n’ai plus les versions originales papier de plusieurs de ces trucs…). Ils n’auront jamais existé, ailleurs que dans ma tête. J’aurai jeté sur papier quelques pensées qui n’auront jamais été lues, vues, cette écriture aura été personnelle, égoïste, sans conséquence… comme une branlette. Dommage peut-être, peut-être pas.

Je suis ambivalent sur le rôle que joue l’écriture dans ma vie. Longtemps un besoin, c’était parti avec la routine. En revenant, elle m’a fait reprendre de vieilles habitudes – il m’arrive même d’avoir envie de fumer quand je suis penché au-dessus d’une feuille un crayon à la main. Et le spleen semble aussi plus… présent. Comme pour plusieurs, l’écriture est un exutoire – rien d’original là-dedans. Mais j’aime également me faire lire, dans certains contextes, et pas toujours. Ce qui me fait surtout hésiter, présentement, c’est la nature de la « micropublication » sur le web, par le biais d’un blogue. Ça me semble tellement plus intime, et je ressens, étrangement, une plus grande proximité potentielle avec le lecteur que je ne suis pas certain d’apprécier. Une plus grande proximité, et une plus grande gêne. Je ne saurais dire pourquoi – peut-être à cause de l’instantanéité de la chose, et de sa fatalité. Démonstration : je viens de parler de branlette dans le paragraphe précédent, ce qui pourra être lu par n’importe qui – employeurs, collègues, amis, famille… Quand je fais lire des pages imprimées, je choisis qui me lira. Et si c’était un livre publié, je ne choisirais plus, mais je serais rendu bien loin des textes. Il n’y aurait plus cette proximité.

Mais bon, tant qu’à avoir un blogue publiant ce que j’écris de temps à autre, pourquoi ne pas y publier ce que j’écris, de temps à autre…? Ces vers ont été écrits, je l’ai dit, mercredi passé. Une mauvaise journée sans raison. Je le disais plus haut, depuis que je me suis remis à l’écriture, on dirait que je deviens plus sensible au spleen. Je ne sais pas trop pourquoi, peut-être parce que je baisse ma garde lorsque je prends un crayon (ça m’arrive moins avec un clavier, comme je le fais présentement, mais mon écriture devient aussi plus cartésienne). Ce poème est un autre exemple de vers spontanés, comme j’en parlais pour mes Vers d’une nuit. Il s’écrivait ligne par ligne, vers par vers, sans que je sache vraiment ce que le prochain allait dire, et où ça allait finir. Le titre a été ajouté à la toute fin, après ma première relecture. Les modifications et réajustements après le premier jet sont minimes (et pour la plupart ont été faites sur la version numérique, d’où l’absence de ratures sur l’original). Il est difficile de commenter quelque chose d’aussi irréfléchi, de quasiment automatique. Mais j’aime bien le résultat, que je trouve très romantique, dans le sens classique du terme