lundi 23 janvier 2012

Semaine 4: Endroit favori



Mon meilleur endroit, c’est toi

Car rien n’est plus merveilleux
Que l’étincelle dans tes yeux
Quand tu vois la première fois

            N’importe où.

Toujours dans les thèmes de favoris, encore une fois je le dévie peut-être un peu de son intention pour le traficoter. Ici, cet endroit est une émotion – je pourrais être n’importe où, du moment que je vois dans tes yeux que tu es émerveillé. D’un point de vue personnel, j’adresse ceci à mes garçons, bien sûr, mais ces lignes pourraient aussi célébrer la naïveté et la découverte.

La première version était beaucoup plus classique, deux alexandrins alternés de deux hexasyllabes, avec une rime plate à tous les six pieds :

Il n’existe de lieux qui soient plus merveilleux
            Que derrière tes yeux
Car le plus bel endroit est celui que tu vois
            Pour la première fois

C’est peut-être à cause des rimes, mais je le trouvais effectivement plate. Puéril. Facile. Ou peut-être trop naïf. C’est peut-être aussi à cause de la trop grande régularité du rythme, 6/6/6 – 6/6/6. On dirait quelque chose d’écrit dans un cours de français au secondaire…

J’aime mieux la nouvelle version, plus éclatée, d’apparence plus libre aussi, mais dans laquelle je tente d’imposer un rythme au lecteur. Les lignes blanches servent à provoquer un arrêt, pas tant pour ralentir le changement de vers que pour accélérer la lecture des trois vers centraux, presque sans pause. Puis, une nouvelle pause, plus longue, avec l’alinéa, avant d’ouvrir le lieu à partout, tout en baissant la voix, et le regard, vers ses yeux. Car c’est là le lieu où je veux être.

J’avais aussi pensé finir avec « n’importe quoi », mais j’ai eu l’impression qu’en élargissant trop le propos (n’importe quoi contenant beaucoup plus que n’importe où, car les où sont des quoi, après tout), je perdais un peu de focus dans le propos. Et la rime « fois/quoi » aurait été de trop, il me semble. La coupure dans les rimes au dernier vers a un impact sur le rythme, il me semble, et fait baisser encore plus la voix, détache la finale des autres vers. Peut-être aussi à cause du son, tout simplement, le « ou » allant en s’adoucissant, alors que le « oua » va en grandissant… Je ne sais pas, je ne suis pas analyste littéraire…

mardi 17 janvier 2012

Le défi


Je n'ai pas mis ici la liste des thèmes du défi 30 semaines, ni expliqué vraiment ce que je fais ici... Ce serait peut-être une bonne idée de me justifier, de justifier, finalement, cette inexistence.

J'ai pris en 2012 la résolution de me remettre à l'écriture de plaisir. Rien de sérieux, du moins, pas encore, mais écrire pour m'amuser. J'ai scribouillé pendant longtemps sur des papiers qui traînaient, je me suis longtemps promené avec un carnet dans les poches (maintenant à 30% illisible - maudit alcool), et je me suis souvent fait dire que j'avais un certain talent. Mais, comme on sait, un talent, c'est du travail, et, comme le disait Obi Wan Kenobi (ou l'aurait dit si c'était venu sur le sujet pendant le voyage vers Alderaan), la Force diminue si on ne l'exerce pas. La vie courante, le travail, les enfants, et la vieillesse en pantoufle devant la tévé m'ont fait négliger mon stylo, et les papiers brouillons inutilisés se sont accumulés. Je n'avais pas le temps d'écrire, mais surtout, je ne prenais pas le temps. De temps à autre, je vomissais quelques lignes ici et là, qui souvent finissaient perdues quelque part ( j'ai un vers sur la gamme de do que je trouve excellent quelque part, très beau, mais je ne sais plus où. Évidemment, si je le réécris, il ne sera plus pareil, alors, il fait partie de ces vers disparus. Je ne sais pas s'ils ont une société, eux...). Je me suis souvent dit que je devrais m'y remettre, juste comme ça, pour réaiguiser ma plume et user du papier. Anyway, que je me dis, ça ne peut pas être pire que Jonathan Painchaud ou Boom Desjardins...

Il y a un bout (entre 1954 et 2011), un ami a fait un défi de dessins sur Facebook, le Thirty Day Drawing Challenge. Chaque jour, il devait faire un dessin en se basant sur le thème suggéré. Les thèmes étaient les suivants:


Le temps est une ressource rare et non renouvelable, alors il m'est absolument impossible de même prétendre penser pouvoir écrire tous les jours. Je ferais cinq heures trente-sept minutes, pis je me crasherais dans ma résolution. J'ai donc été raisonnable: plutôt que des jours, j'en fais des semaines. Quelques vers sur un thème par semaine. Pas des poèmes, pas des textes, des extraits. Des exercices. Je vais commencer avec ça, et puis, on verra bien où ça mènera. Sans prétention.

L'objectif: toujours être meilleur que Jonathan Painchaud ou Boom Desjardins. Parce que, avec eux autres, j'ai de la misère, mon calvaire, j'ai du ressentiment dans le sang c'est comme la rage dans une cage, retiens-moi, j'me dévore le corps...

Semaine 3: Nourriture préférée...



Je pourrais être fin, te dire gentiment
Que mes meilleurs repas étaient ceux avec toi
Mais toi tu me connais, tu saurais que je mens
Que les meilleurs repas, nous les mangeons à trois...

(excusez là)

Avec un thème comme bouffe préférée après animal préféré, ce n'est pas un défi d'écriture que j'ai l'impression de faire, mais un jeu de maternelle... J'ai passé plus de temps à chercher quel était effectivement mon mets favori plutôt que de penser aux mots eux-mêmes, ce qui m'enlève un peu d'intérêt pour le jeu... Ce n'est pas une activité de croissance personnelle que je cherche, bien que l'écriture est toujours introspective, mais des exercices avec les mots, des jeux de vers.

J'ai pensé un moment donné aller vers la sentimentalité à deux sous - Aahh! manger avec toi, comme j'aime ça - mais je n'ai plus 14 ans non plus, alors non, ça n'allait pas (mais cela a tout de même mené aux deux premiers vers...). Alors j'ai cherché dans la dérision, par une chute qui se voudrait un finger au thème lui-même: ma bouffe préférée, ce n'est pas de la bouffe. On peut voir, biffée, la première idée - c'est bon si je ne fais pas la vaisselle. Égoïste, anti-romantique, quelle belle poésie! Une petite blague, à l'impromptue un peu, un quatrain pour dérider.

Puis, finalement, je me suis souvenu de ce à quoi on s'attend de moi, du moins, dans certains cercles. J'ai visé le double sens, dont le deuxième sens est bien entendu vulgairement sexuel - qu'est-ce que j'aime manger? eh bien, ma p'tite dame, je vais vous le dire, ce que j'aime manger! Dans cette optique, je pense que la chute est un peu ratée, mais j'arrivais à mon temps limite, alors tant pis.

Côté forme, je renoue plutôt facilement avec l'alexandrin, qui me revient encore souvent naturellement, ou presque. Mais dans ce cas-ci, malgré qu'ils soient symétriques, je trouve qu'ils manquent de rythme. Je pense que le rythme doit émaner du vers, que le lecteur le (re)découvre lui-même comme il a été écrit. Ce n'est pas le cas ici.

Finalement, je découvre une toute nouvelle utilité à mes longues minutes de transport. Ça fait quelques fois que les vers me viennent derrière le volant, et que je les laisse murir sur la route. Les deux premiers vers ici ont été pensés hier soir, Cap-Santé - Limoilou. Le troisième est né ce matin, Cap-Santé -Trois-Rivières, mais il a tout de même nécessité une chirurgie ce midi au dîner. Le dernier vers - la chute - a été plutôt difficile. C'est évident, bien sûr - c'est dans les derniers six pieds que tout doit tomber en place, c'est court pour déconstruire 42 pieds...

Oh, et dois-je spécifier que dans ce cas-ci, il n'y a rien d'autobiographique? (ajouterais-je, yet...?)

lundi 9 janvier 2012

Semaine 2: Animal favori


Hé, Sam, viens mon chien! Hé, viens ici!
            Viens avec moi marcher dans la nuit
            Lentement errer dans la forêt noire
            Doucement flotter sur le lac miroir
Compagnon de boisson, compagnon d’infortune
            Viens avec moi naviguer vers la Lune
Allez!  Je te gratterai derrière l’oreille
            Que tu m’écoutes à défaut d’être de conseil
Allez mon chien, allez, au pied
Allez vieux frère, viens te promener

Avec les sujets que m'impose le défi 30 semaines, je me disais au début que ça serait difficile pour mon écriture habituellement plus intuitive que technique. Je me disais justement que j'allais en profiter pour m'exercer à formaliser un peu plus mes vers, m'amuser à des jeux de rythme ou de sons. Pourtant... avec un thème imposé de "fav. animal", qui me laissait froid depuis mardi dernier, avec aucune idée de comment l'aborder - en fait, aborder quoi? - je ne pensais pas pouvoir produire quelque chose de senti plutôt que de construit.

Ceux qui me connaissent un peu plus auraient pu me penser plus prévisible et aller vers mon animal emblématique habituel, mais l'oiseau noir aurait été sans doute été la cause d'une versotte (wouhou, j'invente des mots!) d'allure puérile gothisante (...). Comme je ne suis pas emo, je voulais quelque chose de plus ludique. Enter Samuel, le chien de mon père, maintenant au paradis des chiens depuis quelques années déjà. C'est sans doute l'animal-individu avec lequel j'ai eu la plus longue relation. Ce qui m'a mené à ces vers autobiographiques, si l'on veut. Pas de calcul ici, c'est jeté sur le papier comme c'est venu dans ma tête, ou à peu près. Ce qui est de circonstance, étant donné que je parle ici de soirées de boisson, alors que mon écriture était toujours spontanée, pour ne pas dire automatique.

Et, pour l'histoire, c'est presque tout vrai - les nuits où j'arrivais à 3 h du matin chez mon père, que je faisais sortir le chien pour aller marcher dans la forêt ou sur le bord du lac. Quand le canot était déjà à l'eau, il m'est arrivé d'aller au milieu du lac regarder les étoiles et la Voie lactée. Le reflet de la lune faisait comme un chemin, qui donnait l'impression de monter au ciel. Je ne crois pas, toutefois, que j'ai déjà été assez con pour faire embarquer Sam dans le canot, la nuit, quand j'étais pompette. J'ai quand même un minimum de bon sens. À moins que je ne m'en souvienne pas.

lundi 2 janvier 2012

Semaine 1: Sur moi


Pourrais-je s’il-vous-plaît ne pas me présenter
Que doucement s’éveille ma plume endormie
Il me faut prendre le temps de me dérouiller
Avant de prétendre vous raconter ma vie.

Et c'est parti, avec quelque chose que je n'aime pas faire publiquement, parler de moi. Alors, je fais ceci: parler de moi qui n'aime pas parler de moi. Quatre vers tout simples, pas trop réfléchis, et de peu de rythme. J'ai triché un peu ici et là sur mon sens premier, et je n'aime pas le mot "dérouiller". Il sonne mal, je trouve. Mais bon, on commence, alors... on saura m'être indulgent. Je ne suis pas tout à fait content de la deuxième moitié du quatrain.